Guitare Improvisation

L'improvisation en jazz manouche

Dans cette page nous allons voir les notions essentielles qui devraient vous aider à vous lancer (ou vous perfectionner) en improvisation dans le jazz manouche. Il y a déjà de nombreuses vidéos qui parlent de ce sujet sur le site, je vais donc proposer une approche un peu différente dans cette page.

La tradition

La musique qu'on appelle "jazz manouche" a été créée par le guitariste Django Reinhardt (1910-1953) qui était issu d'une famille Sinti, appelés plus souvent "gitans" ou "manouches". Ces communautés au mode de vie nomade sont attachées à la tradition, à la transmission des valeurs et des pratiques qui leur sont chères.

Le jazz manouche porte donc cette idée de tradition, et son apprentissage est souvent fait d'une façon assez définie dont certaines idées clés sont l'immersion (écouter et jouer la musique au quotidien) et l'imitation (notamment par les plans, accords et clichés du style).

N'étant pas moi-même issu de cette communauté, je m'y intéresse mais m'y connais au final assez peu. Mon approche a été ciblée presque exclusivement sur le jeu et la musique de Django Reinhardt qui me touche particulièrement, par l'écoute répétée et l'analyse de nombreux morceaux et improvisations. J'ai ensuite créé une façon d'aborder cette musique à ma manière, et elle évolue chaque jour.

Pour conclure, quelle que soit la façon dont on apprend cette musique, ce qui me paraît important concernant cette tradition c'est de s'y intéresser et de la respecter.

Django, son histoire et sa musique

Django Reinhardt a développé son propre style tout au long de sa vie, en s'inspirant des chansons traditionnelles françaises (musette), des musiques tziganes et des pays de l'est, du swing américain bien évidemment (Duke Ellington) mais aussi de la musique classique.

La richesse du jeu de Django Reinhardt n'est pas toujours perceptible au premier abord, notamment parce que la qualité des enregistrements d'époque est assez mauvaise. Comme pour d'autres musiciens (Charlie Parker par exemple) il faut se pencher quelque temps sur cette musique pour mesurer sa richesse.

Django Reinhardt est un artiste qui a développé un vocabulaire personnel et vaste : les phrases typiques de son jeu sont très nombreuses. C'est aussi un musicien qui selon moi savait apporter de très nombreux contrastes et qui avait un souci de l'élégance qui s'entend en permanence dans sa musique. C'était aussi un virtuose de la guitare, malgré les 2 seuls doigts qu'il utilisait pour jouer ses mélodies (suite à un accident qui ne lui permit plus de déplier son annulaire et son auriculaire de la main gauche).

Il jouait principalement sur des guitares du type Selmer (la marque connue de saxophone s'était lancée dans les guitares à l'époque) et les guitares utilisées actuellement pour jouer cette musique s'inspirent des sons que Django obtenait avec ces guitares. On appelle ça des "guitares manouches".

Django Reinhardt avec une guitare (petite bouche)
Django Reinhardt avec une guitare (petite bouche)
Une guitare manouche (petite bouche)
Une guitare manouche (petite bouche)

La connaissance approfondie du jeu de Django Reinhardt me semble essentielle pour tout apprenti guitariste dans ce style. Avoir relevé quelques soli, quelques grilles (positions d'accords + lignes de basse) et analysée la logique de création sous-jacente est très important. Ce n'est certes pas toujours facile, mais c'est aussi pourquoi je suis là en tant que prof.

Les très nombreux playbacks en jazz manouche que je publie présentent ces grilles relevées, avec la mention de la version de référence (exemple "1937 version"). La mention "accurate chord transcriptions from the original recordings" indique aussi que la grille a été relevée avant d'être écrite puis enregistrée.

L'accompagnement : la pompe

Le chabada et le swing

Le jazz manouche est souvent joué en petite formation : 2 guitares et une contrebasse, parfois un soliste (violon ou clarinette). Pas de batterie donc ! Et pour que ça swingue, il faut faire entendre le fameux "chabada" typique du jazz, le rythme "noire 2 croches" interprété avec du swing (on dit aussi "ternaire"). On peut commencer par jouer ce rythme en étouffant les cordes de la guitare.

Le chabada (noire 2 croches) à la guitare
Le chabada (noire 2 croches) à la guitare

Sans même faire entendre d'accord, ce rythme doit déjà swinguer. Pour bien y arriver il y a plusieurs choses à savoir. Déjà, les 2ème et 4ème temps doivent être accentués, joués un peu plus fort donc. C'est sur ces 2 et 4 qu'on fait le fameux "snap" en jazz, et ce sont d'ailleurs les temps qu'on prend comme référence rythmique pour travailler avec un métronome (plutôt que les 1 et 3). Un autre point absolument essentiel, c'est que les "et" du 2 et du 4, les deuxièmes croches, doivent être très retardées et non jouées binaires. C'est beaucoup ce "retard de la croche" qui fait que ça swingue ou pas.

Pour sentir ça un peu mieux, voici un fichier audio où les 2 et 4 ne sont pas accentués et les croches sur les "et" ne sont pas retardées. Ce n'est pas mauvais, mais ça ne swingue pas.

Le rythme du chabada joué binaire et sans accent
Le rythme du chabada joué binaire et sans accent

Et maintenant avec les 2 et 4 très accentués et les "et" très retardés : on entend presque le rythme de "croche pointée double", comme si chaque temps était coupé en 4. C'est donc un swing très marqué qui est parfois joué pour accentuer le swing, ou qui est utilisé sur les morceaux lents autour de 120-130 bpm.

Le chabada avec un swing très marqué
Le chabada avec un swing très marqué

Les accords

Concernant les accords en jazz manouche, on aura tendance à apprécier les accords qui font "ronfler" la guitare. On peut prendre l'exemple du Am6, qui peut être joué avec ces deux positions courantes et typiques du style.

Am6 : 2 positions courantes
Am6 : 2 positions courantes

La première position est assez classique, très utilisée et pas trop risquée, et l'autre prend un peu plus de place et ronfle beaucoup plus : le powerchord joué sur les 3 cordes graves donne ce son brut, cette "ronfle".

Pour faire la pompe on va chercher à jouer ces accords en faisant le chabada. Dans un premier temps, on peut simplement "pomper" un accord sur tous les temps, c'est-à-dire presser les doigts de la main gauche sur les notes de l'accord, sans forcément jouer avec la main droite. Ça fait peu de son, voici donc ce à quoi ça peut ressembler.

Pomper avec la main gauche
Pomper avec la main gauche

Maintenant il suffit de faire tout ça en même temps : pomper à la main gauche, et faire le chabada à la main droite. Musique !

La pompe sur Am6
La pompe sur Am6

Je présente les choses comme si c'était assez facile et qu'il suffisait de suivre une recette de cuisine, mais c'est un peu plus subtil que ça. Vous rencontrerez sans doute des difficultés de synchronisation main droite / main gauche, ou votre pompe aura trop de sons tenus et pas assez secs (donc pas relâché assez vite à la main gauche), vous n'arriverez peut-être pas à bien swinguer ou encore à être stable rythmiquement...

Sur ce site vous trouverez de très nombreuses pages et vidéos à ce sujet. Je pense par exemple à la vidéo La pompe et les accords qui parle de tout ça très en détail. Il y a aussi la vidéo gratuite Les accords en Jazz manouche dans laquelle je montre de nombreuses positions d'accords typiques du jazz manouche (même si moins détaillés que dans la vidéo La pompe et les accords).

Dans la vidéo intégralement gratuite Les bases du jazz manouche je propose un apprentissage de la pompe un peu différent (ici à 15:40 sur la vidéo Youtube). Et pour travailler la stabilité rythmique vous trouverez entre autres ces quelques vidéos où il faut imiter la pompe jouée et continuer lorsque le son est coupé. La vidéo est aussi ci-dessous.

Résumé

Ces conseils devraient vous donner quelques notions de base pour faire la pompe. Il y a d'autres notions essentielles lorsqu'on accompagne (adapter sa pompe au volume et au jeu du soliste par exemple) et vous trouverez toutes ces informations dans les vidéos citées juste ci-dessus.

Première impro...oups

Commençons sans trop nous poser de questions, pour voir ce que ça peut donner. Il vous faudra au préalable une guitare manouche, et un médiator plutôt épais entre 1mm et 3mm (de nombreux médiators souvent utilisés sont présentés dans la vidéo Les bases du jazz manouche à 9:46).

On peut commencer à improviser sur une gamme donnée, disons Do majeur. C'est une tonalité très utilisée dans les standards du jazz manouche, ça vous servira bien par la suite (dans d'autres vidéos comme Les bases du jazz manouche ou Coquette je propose de se lancer en impro avec la gamme de Ré majeur, ici on change un peu donc).

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Gamme de Do majeure

Voici le diagramme qui correspond à cette gamme. On peut donc commencer par jouer cette gamme note à note, puis faire une petite impro par-dessus un playback qui sous-entend cette gamme (ce playback du A de Swing 42). Je ne vous cache pas que dans ce fichier audio, je fais exprès de jouer comme si je ne connaissais aucun des conseils qu'on verra par la suite. Ne vous attendez donc pas à un résultat excellent...

Les deux remarques qu'on peut faire sur cet enregistrement, c'est que le son est tout petit voire mauvais, et que l'impro n'est pas en rythme.

Résumé

Si ces erreurs vous paraissent exagérées et que vous pensez maîtriser ça, sachez que ces points importants à travailler (le son / la technique / le placement rythmique) sont tellement essentiels que les musiciens les travaillent toute leur vie. Si vous souhaitez progresser il va donc falloir s'y atteler.

Le son et la technique

Les guitares manouches sont faites pour être jouées en acoustique principalement. Il faut donc "rentrer dans la guitare" pour bien la faire vibrer et en tirer un beau son. Les cordes devront être réglées plutôt hautes donc, et il faudra bien presser les cordes à la main gauche et les attaquer fermement (mais pas brutalement) à la main droite. La frise pourra être légèrement présente.

Voici un fichier audio dans lequel j'essaie d'avoir différents types de son avec ma guitare. Certains sont clairement mauvais, d'autres sont intéressants : c'est aussi une question de goût, il n'y a pas qu'un seul beau son.

Comme les conseils sur la technique ne sont pas faciles à donner par écrit, je vous conseille de visionner la vidéo Les bases du jazz manouche à 26:14 si ça n'est pas déjà fait.

Le son et la technique sont donc intimement liés. Il est très formateur de passer beaucoup de temps à jouer en solo, sans accompagnement, pour travailler ce son et cette technique. Ces gestes doivent être assez fermes et donc nécessitent un entrainement et une adaptation du corps (muscles, corne des doigts) lorsqu'on débute dans ce style, et cela prend au moins plusieurs mois avant de pouvoir jouer en étant confortable (entre 1 et 2 ans pour moi).

Voici un fichier audio où vous pouvez m'entendre travailler en solo : je joue en me concentrant sur la technique, le confort, la beauté du son selon mes critères et éventuellement sur les phrases que je joue.

Pour avoir une idée de ce qu'est un beau son de guitare au jazz manouche, je vous conseille d'écouter le solo de Django sur "Coquette" à 00:47 (Janvier 1946).

Première impro : l'anatole (Daphné / Swing 42 / Artillerie lourde)

Maintenant qu'on en sait un peu plus sur le son et la technique, nos improvisations devraient mieux sonner. On peut donc repartir sur le playback du A de Swing 42 à 180 bpm en Do majeur (ou celui du A de coquette à 160 bpm en Ré majeur). Chercher des playbacks très lents (autour de 100 bpm) n'est pas forcément une bonne idée car ça devient très difficile de travailler le swing à un tempo lent.

On va donc se concentrer sur le son et la technique bien sûr, mais aussi sur notre placement rythmique en commençant par jouer une majorité de notes sur le temps, des noires donc. Illustration.

Avec la pratique et le temps, tout cela deviendra des automatismes. Vous serez de plus en plus amenés à penser en phrases plutôt qu'en simples "combinaisons de notes sur la gamme majeure". Voici donc une improvisation de meilleure qualité dans laquelle je joue des phrases (entrecoupées de silences, c'est important).

Résumé

Cette façon d'aborder l'improvisation par l'exploration des gammes et la création de phrases est selon moi essentielle et offre une grande liberté. Elle n'est pourtant pas toujours mise en avant dans l'apprentissage du jazz manouche, qui met plutôt l'accent sur l'apprentissage des "plans", tout aussi important à condition qu'il soit bien fait. On y vient justement.

Apprendre des plans

L'apprentissage des "plans" ou "licks" fait partie intégrante de l'apprentissage en jazz manouche. Pour avoir côtoyé de nombreux musiciens, élèves et professeurs dans ce style, je peux dire que c'est une approche que je trouve vraiment bénéfique uniquement si elle est faite de façon réfléchie et avec une vraie méthodologie.

L'apprentissage du vocabulaire et de l'accent

Les plans sont utiles pour aider à l'immersion dans le style, à jouer une phrase typique et de s'en inspirer pour créer d'autres phrases qui auront une sonorité similaire. En connaitre plusieurs permettra encore mieux de comprendre la logique ou "l'âme" de cette musique. C'est une approche d'autant plus importante que ce style a été créé par un seul musicien, et que cette musique est donc très définie : les phrases de Django sont les "bonnes phrases" si on dit les choses un peu simplement.

Enchaîner des plans ou improviser ?

Les guitaristes manouches ont parfois tendance à simplement enchaîner des plans. Le problème avec cette approche, c'est que leur improvisation n'est pas très personnelle et pas vraiment dépendante du morceau et de leur humeur (et ça le public l'entend très bien). Mieux vaut s'entraîner à comprendre les idées sous-jacentes aux plans qu'on aime bien, et d'utiliser ces idées pour créer nos propres phrases. Et cela n'exclue pas de temps en temps de sortir des phrases toutes faites si on les trouve excellentes.

Illustration avec un plan de Django

Pour illustrer ces propos, prenons cette phrase de Django Reinhardt qu'on retrouve dans de nombreux soli : Coquette (1946) à 1:29 ou I can't give you anything but love (1947) à 1:21 par exemple.

Ce plan est basé sur un "chemin", une espèce d'arpège amélioré qui fait entendre le degré V de la tonalité (accord 7) avec des enrichissements : b9, #9 et #11 et b13. Et ces enrichissements sur G7 sont tous dans le mode altéré de Sol : c'est donc un dessin de phrase basé sur Sol altéré (pour plus d'informations sur le mode altéré, c'est à la page Les 7 modes de la gamme mineure mélodique).

Un plan de Django sur Coquette (transposé en Do majeur)
Un plan de Django sur Coquette (transposé en Do majeur)

Analyser les choses de cette manière ("mode altéré") n'est pas forcément le plus pertinent : Django par exemple ne raisonnait probablement pas comme ça, car il connaissait peu de choses à la théorie musicale apparemment. Il avait sa manière à lui de raisonner et de concevoir ses phrases. C'est d'ailleurs un sujet qui fera l'objet de plusieurs vidéos qui sortiront vers juin-juillet 2017.

Réutilisation du plan

Ce plan a de nombreuses raisons d'attirer l'oreille : notes hors de la tonalité (b9 #9 #11 b13), résolution assez simple et très belle (fondamentale du degré I), début de phrase qui monte vite, effet du triolet au milieu du débit de croches... Une des clés pour réutiliser ce plan de manière personnelle, c'est de chercher à comprendre ce qui fait que cette phrase vous plaît.

Voici des transformations de ce plan en fonction de ce qui peut plaire dans la phrase originale :

Variations : idée d'une note par corde
Variations : idée d'une note par corde
Variations : idée du triolet aigüe
Variations : idée du triolet aigüe
Variations : idée des notes dissonantes
Variations : idée des notes dissonantes

Vous voyez que la possibilité d'évolution du plan est immense, et pour l'instant je suis resté assez simple. Si vous êtes féru de théorie vous avez remarqué que certaines phrases mélangent les enrichissements diatoniques du degré V (9M, 13M) et les altérations issues du mode altéré (b9, #9, #11 et b13).

Penser de cette manière n'est pas la meilleure je pense : il vaut mieux essayer de résonner en "mélange de notes", pour savoir quelle combinaison de note donne quel son : la b9 et la b13 (comme dans le plan original), la 9M et la b13, la #9 et la #11... Ou en raisonnant en terme de case et par rapport à l'accord de base G7, comme Django le faisait probablement. Ou encore en pensant l'accord de Db7, avec sa 9M et sa 13M. Voici un schéma qui éclaircit tout ça, et qui j'espère s'approche de la façon dont Django Reinhardt pensait ses phrases sur les degrés V. Le plan de Coquette en est directement inspiré.

La conception du manche selon Django (selon moi)
La conception du manche selon Django (selon moi)

Cette approche et ces conseils que je vous donne, je les ai déduits des relevés de Django Reinhardt que j'ai faits et que j'ai analysés. J'essaie donc de deviner la façon dont il concevait les choses (très intéressant d'un point de vue artistique) pour m'en inspirer dans mon processus créatif et dans ma pédagogie. Voici plusieurs phrases jouées par Django qui réutilisent ce type de phrase. C'est évidemment dans des tonalités et des positions différentes.

Phrase sur Django's Tiger
Phrase sur Django's Tiger
Phrase sur Embraceable You
Phrase sur Embraceable You
Phrase sur I can't give you anything but love
Phrase sur I can't give you anything but love
Phrase sur I Love You
Phrase sur I Love You

Concrètement, comment bosser les plans ?

Déjà, il faut travailler des plans si vous pensez que c'est ce qui vous manque, pas par défaut. Ensuite, essayez le plus possible de choisir des plans dont vous aimez la sonorité. Vous pouvez passer quelques jours à jouer ces plans tels quels, sans variations, et en essayant de les faire coller à différents accords ou différentes gammes.

Cette phase n'est pas très compliquée mais elle demande beaucoup de temps. Il faut passer des heures, des semaines, des mois à rejouer ses plans préférés et à les modifier. Le jour où ces plans commenceront à vous gonfler c'est que vous les aurez suffisamment travaillé.

Mais le plus important et le plus intéressant dans le travail des plans selon moi, c'est de passer du temps à prendre du recul et de trouver les idées sous-jacentes aux plans qu'on aime bien et qu'on connaît. Il suffira alors de penser à ces idées-là, plus globales, pour jouer des centaines de phrases ayant une sonorité proche du plan initial.

Résumé

En écoutant Django Reinhardt on se rend compte assez vite que c'est de cette manière qu'il raisonne. Même si certaines phrases sont parfois rejouées telles quelles, la majorité de ses plans sont presque toujours joués différemment. La finalité bien sûr c'est de trouver vos propres plans, vos propres idées : ça demande du temps de réflexion mais c'est très intéressant. Il y a même une vidéo consacrée à ce sujet : Créer ses phrases (sur des cadences courantes). D'ici quelques mois (milieu d'année 2017) il y aura deux vidéos d'une heure à ce sujet !

Les arpèges d'accords

Les arpèges d'accords sont particulièrement importants à apprendre en jazz manouche. La première raison c'est qu'on se sert des arpèges d'accords comme des guides sur lesquels et autour desquels on va jouer pour improviser. Il suffit de relever quelques secondes d'improvisation d'un guitariste manouche pour s'en rendre compte.

Arpège d'accord sur Am (At Jimmy's bar)
Arpège d'accord sur Am (At Jimmy's bar)

Une autre raison qui est probablement liée à la première (jeu de Django Reinhardt) c'est que l'improvisation en jazz manouche est très verticale : des montées et descentes rapides qui seront d'autant plus faciles à faire si on se guide avec les arpèges d'accords. C'est assez typique du swing des années 30 et particulièrement du jeu des clarinettistes.

Les arpèges d'accords qu'est-ce que c'est ? Ce sont les notes des accords qu'on va jouer mélodiquement. On utilise des arpèges de 3 ou 4 sons en général. Les arpèges d'accords sont un sujet dont je parle dans plus de la moitié de mes vidéos et dans de très nombreuses pages, notamment aux pages Arpéger tous les accords : le système CAGED et Bien apprendre ses gammes et ses arpèges.

Une des spécificités des arpèges en jazz manouche est qu'on les travaille souvent en diagonale sur le manche, c'est-à-dire en faisant des démanchés. Voici un arpège diagonal de CMaj7 (notes Do Mi Sol Si). Pour bien l'entendre il est préférable de commencer à chaque fois par la fondamentale comme je le fais dans les fichiers audio, même si avec l'expérience on ne le fera pas systématiquement.

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Arpège de CMaj7 en diagonale sur le manche
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Arpège de CMaj7 en diagonale sur le manche

Ce travail des arpèges demande un temps colossal surtout quand on a un niveau débutant ou intermédiaire en impro. Il permet de s'entrainer à bien faire entendre la grille (à bien "coller à la grille") mais aussi à travailler la technique car ces arpèges sont difficiles à jouer, encore plus lorsqu'ils sont faits sur des accords à 3 sons : il faut s'entraîner à faire de grands démanchés à la main gauche. Pour finir en musique, voici un petit exemple de ce que ça peut donner sur la grille de Blues en mineur sur 3 accords : Gm6, Cm6 et D7 (pas de Eb7 sur la version "à l'ancienne"). Le playback est disponible ici.

Afficher les arpèges d'accords utilisés

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Arpège de Gm6
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Arpège de Cm6
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Arpège de D7

Ce site publie de très nombreux playbacks en jazz manouche, et certains contenant très peu d'accords : idéal pour travailler vous arpèges donc. Je pense notamment aux playback Am6 (160 bpm), Am6 (190 bpm), D C#7 (160 bpm)...

Résumé

Pour avoir des pistes de travail plus précises à ce sujet je vous conseille la vidéo Minor swing dans laquelle je parle en détail de ce sujet en donnant de nombreux conseils et exercices. Il y a aussi la vidéo Bien apprendre ses gammes et ses arpèges qui n'est pas axée jazz manouche mais qui permet de bien comprendre la logique de construction des accords et des gammes et dans laquelle je propose de très nombreux exercices.

Le swing, le placement rythmique

Oui, le swing ! Cette interprétation rythmique qui fait danser même les phrases les plus simples. Pas de jazz manouche (ni de jazz) sans ce swing.

C'est essentiel de savoir swinguer et d'être soucieux des différentes façons de swinguer. En jazz manouche et en jazz il y a peu de différences, si ce n'est qu'en jazz manouche on ne joue pas souvent derrière ("laid back") mais bien sur la pulsation voire parfois un peu devant. Pour le reste on peut tout faire : un swing très marqué (presque croche pointée double), plus léger ou assez droit comme beaucoup de guitaristes manouches font. On peut même jouer carrément binaire de temps en temps, ça amène un contraste très intéressant. Et devinez qui faisait ça ?

Décidément il était plutôt bon le Django. Écoutez donc cette première grille de Blues Clair.

Plusieurs swings sur une même grille : Blues Clair
Plusieurs swings sur une même grille : Blues Clair

Ça c'était pour la culture générale, maintenant passons à la pratique. Faire swinguer un élève qui a du mal à swinguer, c'est toujours un challenge pour moi. Mon approche pour ce type d'exercice rythmique, c'est de beaucoup miser sur le ressenti et l'imitation : il faut écouter du jazz qui swingue, essayer d'imiter ce swing et faire des exercices qui nous aident à y arriver.

Dans certaines vidéos comme Minor swing je propose donc des exercices d'imitation où le but est de jouer un rythme simple qui swing en même temps que moi (fichier audio). Voici l'exercice en question, avec le modèle audio dans l'oreille gauche et la version dans l'oreille droite. Je me décale un peu, écoute le modèle audio puis fini par jouer bien synchronisé.

Rythme à jouer par imitation
Rythme à jouer par imitation

Le fichier audio modèle est disponible ici et téléchargeable. Il est issu de la vidéo Minor swing qui contient 5 autres rythmes à imiter.

Rythme à imiter : modèle audioConnectez-vous à votre compte ou inscrivez-vous pour télécharger ce document

C'est un exercice essentiel et pourtant pas évident : il faut être bien concentré sur le fichier audio pour entendre si on joue avec le modèle ou si on est décalé.

Astuce ! Vous pouvez aussi vous aider du mouvement du médiator, puisque c'est le coup vers le haut qui est retardé temporellement : on le joue juste avant d'arriver sur la noire du 2ème temps de la mesure. C'est aussi quelque chose que je développe dans la vidéo Minor swing.

Vous pouvez donc vous entrainer avec ce fichier audio, qui est gratuitement téléchargeable ci-dessus. Pour aller plus loin je vous conseille d'aller voir les vidéos Minor swing et Apprendre à swinguer par imitation ou encore la page L'improvisation jazz.

Aller plus loin

Cette page est assez chargée en informations, mais pourtant très succinte sur de nombreux points. Il y a de très nombreuses vidéos (gratuites ici et ici ou payantes ici) qui parlent de nombreux sujets concernant le jazz manouche. Je vous conseille d'aller les visionner voire les acheter, mais aussi d'aller voir toutes les infos disponibles sur le site au sujet du jazz "non manouche" : elles sont très nombreuses et sous de nombreux aspects similaires aux astuces que je peux donner en jazz manouche.

Et si vous voulez aller encore plus loin, voici quelques conseils pour les niveaux avancés.

Relevez, boudiou !

Je rencontre tous les jours des guitaristes manouches qui... n'ont jamais relevé Django ! Écouter et relever cette musique, c'est accéder directement à son essence.

Pour bien relever, il faut commencer par relever les notes une à une (je donne plein de conseils à ce propos à la vidéo gratuite Repiquer un morceau avec Audacity), rejouer le solo en entier si possible et également analyser les phrases. Et ensuite réincorporer les phrases qu'on préfère dans nos improvisations en les personnalisant, comme expliqué plus haut à la partie "apprendre des plans".

Et vous pouvez aussi relever d'autres musiciens dans ce style. Pour en citer quelques-uns que j'affectionne ou qui sont assez connus : Biréli Lagrène, Angelo Debarre, Sébastien Giniaux, Rodolphe Raffalli, Tchavolo Schmitt, Adrien Moignard, Les doigts de l'Homme, Serge Krief, Matelo Ferret, Fapy Lafertin...

Allez jammer

À quoi bon travailler autant la guitare si ça n'est pas pour partager ça avec d'autres musiciens ? Sortez jammer, les jams de jazz manouche sont nombreuses en France, même dans des villes de taille moyenne. Vous ferez de belles rencontres, rencontrerez des musiciens meilleurs et moins bons que vous, progresserez et monterez peut-être des groupes avec les musiciens rencontrés.

Évitez la logique du "j'ai trop mal joué je suis trop nul". À moins que la jam soit faite dans une mauvaise ambiance, ce qui est très rare, personne ne vous critiquera si vous jouez des notes à côté. Allez-y progressivement et vous serez certains de passer un bon moment.

Contactez-moi

Le jazz manouche éveille facilement des passions. Les fans de ce style de musique sont nombreux et ce sont souvent de fins connaisseurs. Donc, si vous vous y connaissez et que vous pensez que j'ai dit des bêtises dans cette page n'hésitez pas à me contacter à la page Contact, je serais très content d'améliorer la qualité de mon site grâce à vous (à condition que votre message soit bienveillant bien sûr).

Résumé

J'espère que cette page vous aura bien motivé à progresser dans ce style élégant qu'est le jazz manouche. Vous savez que vous trouverez de nombreuses infos dans les vidéos du site, gratuites comme payantes, et je vous conseille de vous abonner à la chaine Youtube et la page Facebook car dans les années à venir ce contenu ne va pas cesser de croitre.