Guitare Improvisation

Les erreurs courantes en improvisation

Cette page devrait aider les guitaristes déjà un peu expérimentés qui ont besoin de conseils et de pistes de travail pour améliorer leurs impros. Si j'écris cette page c'est parce que j'ai remarqué avec le temps que les apprentis improvisateurs recontrent souvent les mêmes problèmes.

Voici les pistes de travail proposées dans cette page.

Le placement rythmique

Le placement rythmique est un point essentiel du jeu musical (le placement rythmique c'est la capacité à savoir placer ses notes de manière précise par rapport à une pulsation). Et il faut commencer par savoir jouer bien dans la pulsation en ayant un débit très régulier (noires, doubles-croches...) sans se décaler ou se désynchroniser de la pulsation.

Une des cause majeure de ce problème (placement rythmique imprécis) est qu'on ne considère pas ça comme essentiel (en France ? En Europe ?). On travaille les gammes, la technique, les effets... Pourtant le placement rythmique est un moyen d'expression fondamental : si vous faites exprès de vous décaler un peu rythmiquement lors d'une impro, vous pouvez être sûr que le public va ressentir cette tension rythmique. Autant apprendre à maitriser ce paramètre pour gagner en expressivité.

Concrètement, ce qu'on entend souvent dans une improvisation avec un mauvais placement rythmique c'est que "ça flotte". Le problème c'est que vous qui jouez, vous ne l'entendrez probablement pas, votre oreille n'étant pas éduquée assez finement. Il vous faudra donc l'avis d'un musicien/professeur expériementé qui pourra vous donner des conseils.

Pour travailler ça, il faut dans un premier temps s'y sensibiliser : essayez de reconnaitre quelqu'un qui joue bien sur le temps, ou au contraire derrière ou devant. Ensuite, vous pouvez faire des exercices sur des playbacks très clairs rythmiquement (voire même avec un métronome). J'en parle beaucoup à la page Travailler avec un métronome. Développez cette capacité à adapter votre placement rythmique, ça vous sera vraiment très utile.

Le jeu stylistique

Nous avons tous un fort passé musical. Les guitaristes passent souvent par le blues, le rock, la pop... Ces influences ne doivent pas nous empêcher de bien jouer d'autres musiques et de nous "fondre" dans un autre style.

À chaque style musical ses effets, ses recettes, sa logique. Sa "vérité" en somme. Et quand on veut être un musicien polyvalent il faut savoir passer d'un style à un autre un peu comme on change de langue quand on change de pays. Il faut donc s'adapter à tous ces petits "trucs" qui font qu'un blues sonne américain, une symphonie sonne européenne ou une samba brésilienne. C'est très important.

Il faut donc s'entrainer à jouer bien dans le style lorsque le morceau le demande. Mais lorsqu'il s'agit de compositions c'est à vous de créer votre propre style bien sûr ! Ce qui est certain, c'est que plus vous maitriserez des styles différents plus vous aurez de recul sur ces codes du language qui varient d'un style à l'autre, et donc plus vous maitriserez la personnalisation de votre style.

Accroche et simplicité

Une improvisation n'est pas simplement un débit de note. C'est pourtant ce qu'un auditeur peu expérimenté percevra à l'écoute d'un solo qui manque de phrases d'accroche et de simplicité. Et nous, nous voulons que nos improvisations soient appréciées autant par les auditeurs novices que confirmés, n'est-ce pas ?

Une improvisation c'est une création musicale qui est en général faite pour être partagée. Avec des auditeurs s'il y en a et avec les collègues musiciens qui nous accompagnent. Il faut donc apprendre à attirer l'attention avec des choses simples et efficaces. C'est une façon de dire "bonjour tout le monde, je vais parler".

Un exercice que je conseille souvent (et dont je parle dans certaines vidéos comme Minor swing) consiste à créer une phrase simple de 3-4 notes et à la répéter. Vous allez peut-être vous dire "oula mais c'est vulgaire, c'est pas du tout subtil ça". Contentez-vous de le faire pour commencer : tant que vous n'y arriverez pas, ne vous donnez pas le droit de critiquer.

Sachez que ce genre de procédé (répétition de mélodie simple) est très efficace pour attirer l'attention. Les publicitaires en savent quelque chose malheureusement.

Le plus intéressant avec ces phrases simples qu'on répète, c'est de s'amuser avec. Plutôt que de répéter la même phrase, changez quelques notes. Modifiez un peu le rythme. Répétez-la 3 fois plutôt que 10, pour rendre l'effet plus subtil. En visant votre amusement vous allez naturellement placer le curseur au bon endroit entre "mauvais goût" et "effet de répétition trop subtil".

Aussi, quand vous jouez en groupe et que ce genre de procédé arrive, soyez attentif aux intensions des membres du groupe : le batteur veut-il que vous continuiez à répéter votre phrase ? Le public trouve-t-il ça un peu grossier ? Fiez-vous à votre écoute pour percevoir comment attirer l'attention des auditeurs sans passer pour un publicitaire qui veut faire passer son jingle.

Clarté et respiration

Un autre point qu'il est important de garder en permanence en tête, c'est d'être clair dans son discours et de faire des phrases. Dit plus techniquement, c'est "entrecouper ses mélodies par des silences".

Le silence permettra à l'auditeur de se reposer un peu. Mais pas que. Si vous venez de jouer une belle phrase, laisser un long silence juste après permettra à tout le monde de savourer cette phrase : elle continuera à résonner dans nos têtes.

En guitare il faut malheureusement penser souvent à ces respirations puisque notre instrument ne nous en impose pas, contrairement aux instruments à vent par exemple. Aussi, quand on découvre une gamme, un morceau, un exercice d'improvisation, on a envie de débiter des notes ce qui est normal (et bien dans une certaine mesure). C'est probablement pour cette raison que je n'ai jamais vu un élève à qui je n'ai pas eu à dire "tu ne respires pas assez".

Et je m'inclue dans ces élèves.

Son de guitare et prise audio

Dans cette partie, nous n'allons rien voir de très technique sur le son mais plutôt des principes de base à garder en tête pour travailler dans la bonne direction.

Quand on joue d'un instrument, c'est important de savoir en jouer d'une matière adaptée à sa nature. La façon dont il est construit va nous imposer une (des) manière(s) de jouer à laquelle il faut être sensible, un peu comme si on "écoutait" ce que l'instrument demande.

Là, vous vous dites que le gars qui écrit ça plane complètement.

Parlons concrètement et prenons une configuration précise : vous jouez un riff de hard rock sur une Gibson avec un gros son saturé (mais pas trop non plus : c'est du hard rock et pas du métal). Si vous faite un powerchord de E5 (3 cordes graves de la guitare) vous remarquerez qu'il n'est pas nécessaire d'attaquer les cordes très fort pour avoir un bon son saturé. Si vous attaquez les cordes très fort en revanche, vous aurez un peu plus de claquant à l'attaque et un son plus "sale" mais moins de sustain : les cordes attaquées très fort vont frapper les frettes et leur amplitude va être instantanément réduite. Si en revanche vous attaquez les cordes tout doucement vous aurez une saturation pas très convainquante, et surtout les 3 cordes seront entenduent égrenées ce qui est rarement souhaitable.

Prenons maintenant l'exemple d'une guitare manouche que vous utilisez pour faire un solo. C'est une guitare qui se joue acoustique et qui "demande" à être attaquée fort pour avoir un bon son (sinon ce type de guitare sonne facilement "cagette"). Le son doit bien résonner en acoustique, donc pas question d'atténuer cette résonnance : on va laisser les autres cordes vibrer par "sympathie" et on évitera de poser les doigts sur la table de la guitare, ce qui étoufferait la résonnance.

Derrière ces exemples ne se cache pas des vérités mais plutôt une méthode : il n'y a pas une seule façon de jouer une Gibson ou une guitare manouche. Ce qui est important c'est d'être à l'écoute de l'instrument et de voir comment il réagit en fonction de la façon dont on le joue.

Pour modifier votre manière de jouer, vous pouvez changer la manière dont vous posez ou maintenez les doigts de la main gauche, votre médiator et la façon dont vous l'utilisez, vos cordes, votre ampli, les volumes de la guitare ou de l'ampli...

Concernant la prise de son c'est la même histoire : on va essayer de trouver le son qu'on souhaite avec l'instrument, et ensuite on adapte la chaine de prise de son. Choix du micro et positionnement, câble, système d'enregistrement. L'idée de base est d'enregistrer le plus fidèlement possible le son qui nous plait. Par exemple, mettre le potentiomètre de volume de la guitare à 2 et monter à fond le gain du système d'enregistrement est rarement intéressant.

Réaliser un bon enregistrement ne s'explique pas en quelques lignes, mais gardez au moins en tête ce principe de "restitution fidèle du son". Que ce soit d'un son acoustique ou d'un "son informatique", peu importe.

Rôle du professeur : oreille, recul, expertise

Ce qui est souvent difficile quand on est autodidacte, c'est d'avoir du recul sur son jeu. On peut passer un an à s'écouter, se poser des questions... Et un jour un bon prof nous fait un simple commentaire sur notre jeu et on se dit "mais bon sang mais c'est bien sûr !".

Ce bon professeur rien ne pourra le remplacer je pense, même une pleine page de conseils comme celle que vous êtes en train de lire. Cela dit, savoir comment fonctionne ce processus peut nous aider dans notre progression instrumentale. Et aussi nous aider à bien choisir un prof.

La première chose que le (bon?) prof a développé, c'est son oreille. Il pourra percevoir mieux que vous si vous êtes un peu décalé rythmiquement, si votre jeu manque de cohérence harmonique ou de cohérence tout court.

Ensuite, la personne étrangère qui vous écoute a un avantage par rapport à vous : il n'est pas vous ! Vous, vous vous connaissez par coeur et vous avez donc peu de recul sur votre jeu. Vous connaissez vos tics de langage, vos qualités et vos défauts, et vous adaptez donc votre écoute.

Une troisième chose que le prof a probablement de plus développé que vous, c'est l'expérience. Autant artistique que pédagogique : un prof a en général fait pas mal de projets musicaux et de spectacles, et également vu beaucoup d'élèves et de qualités et défauts. Il pourra donc se baser sur cette expérience pour savoir quel type d'exercice qui vous aidera à avancer.

Sachant tout ça, essayez de voir comment vous pouvez gagner en recul sur votre jeu. Essayez aussi de voir quel type de prof et quel type de cours vous conviendrait aussi. Ne vous contentez pas d'accepter une formule du type "cours à plusieurs" ou "un cours d'une heure toutes les semaines" si vous ne pensez pas que ce genre de formule vous convient.

J'espère que tout ce texte vous aura aidé à avancer et à y voir clair. Et maintenant que vous avez lu et compris, gardez ça dans un coin de la tête et allez jouer de la guitare (ou plus simplement "reprenez une activité normale").